Le deuxième jour du procès de l’homme de 34 ans jugé depuis lundi par la cour d’assises de l’Isère pour viols avec actes de barbarie, sévices sur des animaux et détention d’images pédopornographiques a vu deux policiers détailler une enquête qui les a profondément marqués.
Ils ont de l’expérience. Vingt à trente ans de police dont une grande partie dans des services d’enquête. Pourtant, les deux policiers grenoblois qui ont témoigné mardi matin à la barre de la cour d’assises de l’Isère n’avaient « jamais vu ça ». En juin 2020, ils avaient reçu deux courriers écrits par une jeune femme et un homme ayant, tous les deux, partagé successivement la vie d’un homme récemment installé à Grenoble. Le jeune homme avait dénoncé des sévices commis par son ex-compagnon sur des rats éventrés, amputés des quatre membres, cuits, parfois mangés, ébouillantés. Il avait également dit avoir été contraint d’avoir un rapport sexuel avec un chien sur ordre de son compagnon et d’avoir accompagné ce dernier dans une écurie où il aurait pénétré un poney.
La jeune femme, qui avait également entretenu une relation amoureuse avec cet homme rencontré sur Facebook, avait couché sur le papier une histoire similaire. Elle aussi avait confié avoir été contrainte à une relation sexuelle avec un chien par l’homme qui menaçait de tuer l’animal s’il n’obtempérait pas. Le chien avait tout de même été tué. Les quatre pattes attachées, un nœud coulant autour du cou, l’animal avait été traîné au sol jusqu’à sa mort. Puis stocké dans le garage du logement grenoblois jusqu’à ce que l’odeur ne dérange ses voisins. Le chien avait ensuite été découpé en morceaux dont l’Isérois se serait ensuite séparé.
« On reçoit parfois des courriers fantaisistes qui nous décrivent des faits tout aussi fantaisistes. Mais là, tout s’est vérifié immédiatement », raconte l’un des deux fonctionnaires de police qui a mené cette enquête « très particulière ». « On a été suivi par un psychologue en fin d’enquête pour évacuer toutes ces atrocités », raconte son collègue qui dit n’avoir « jamais vu d’actes pareils avec un tel détachement et un manque d’empathie ».
Des faits « d’une sauvagerie et d’une cruauté incroyables »
Parce que la perquisition menée chez le suspect, dans le quartier Vigny-Musset de Grenoble, ainsi que les auditions du Grenoblois avaient confirmé les dénonciations de l’ex-compagne et de l’ex-compagnon. Dans son ordinateur, les policiers avaient découvert des dizaines de milliers de vidéos ou photos pédopornographiques, zoophiles ou de sévices sur des animaux. Dont 339 images et 56 vidéos sur lesquelles l’Isérois était identifié dans des actes de zoophilie.
« Il a reconnu avoir torturé des animaux en leur injectant de la glu dans la bouche ou du white-spirit dans les poumons pour voir combien de temps ils mettraient à mourir », raconte un policier. « Avec un autre homme que nous ne sommes pas parvenus à identifier, ils prennent un lapin, ils lui ligotent les pattes et le pénètrent jusqu’à le tuer », ajoute le second fonctionnaire de police qui parle de faits « d’une sauvagerie et d’une cruauté incroyables ». Des images abjectes auxquelles les jurés ont été confrontés mardi matin mais que l’accusé n’a pas voulu regarder. « Il y a de choses auxquelles je ne souhaite pas me confronter si ce n’est pas indispensable », esquive-t-il.
« Une personne hors du temps, hors de la société »
Outre l’horreur des faits qu’ils ont découverts, les deux policiers se souviennent particulièrement de l’attitude de l’homme qu’ils avaient face à eux durant sa garde à vue. « J’ai rarement vu quelqu’un aussi neutre dans son expression », raconte l’un des policiers qui se souvient du suspect commentant les photos le montrant en train de torturer des animaux « avec un calme olympien ». « Pas d’affect, pas d’émotion. Pas de crise de folie, pas de cris. Tout était calme, contrôlé, posé », poursuit le brigadier-chef. « Une personne hors du temps, hors de la société », résume son collègue qui avait également été chargé de lire les échanges entre la jeune femme et son ex-compagnon aujourd’hui jugé par la cour d’assises de l’Isère.
Elle avait 17 ans et tentait de vendre quelques dessins sur Facebook. Il avait 29 ans et lui en avait acheté quelques-uns. « Il sait utiliser les mots et trouver les angles d’attaque. Il écoute, il est alors affectueux et bienveillant », resitue le policier à propos de ces premiers messages. Dont ceux échangés au cœur d’une nuit d’avril 2018. « Je suis zoophile, j’aime tuer des animaux », écrivait l’homme à l’adolescente que ces mots n’avaient pas effrayée. « Elle s’est sentie la possibilité de changer cet homme », analyse un policier. Deux heures plus tard, l’homme avait écrit : « J’ai tellement peur de ne pas être aussi heureux en étant quelqu’un de bien.»